J'ai passé une décennie à présider le groupe qui a supervisé la réponse aux menaces biologiques et autres à Hong Kong. L'épidémie de SRAS de 2003 a été l'un des défis que nous avons dû relever, et j'ai eu la chance de pouvoir compter sur une équipe exceptionnelle de hauts responsables qui m'ont enseigné de précieuses leçons sur le leadership en cas de pandémie.

J'en ai tiré trois leçons essentielles. La première est l'importance des histoires dans le leadership. Je le savais, mais sous la pression du moment, alors que les décès s'accumulaient, j'ai oublié les l’essentiel. Lors des réunions où la réponse rapide du gouvernement était en cours de finalisation, j'ai parlé de l'importance singulière de l'hygiène personnelle et environnementale. Mon "maître" politique, qui cherchait quelque chose d'un peu plus sexy, a éclaté d'indignation : "C'est ça ? C'est ce que nous allons dire aux gens : "Maintenant, lavez-vous les mains" ? "en citant de façon parodique un message sanitaire du gouvernement du siècle dernier.

Avec le recul, cette réaction était compréhensible et légitime. Si j'avais raconté comment l’armée, bien que sceptique, avait été converti à l'importance du lavage des mains grâce à une simple expérience, j'aurais alors peut-être mieux fait passer le message.

Dans l’expérience, les recrues de l'armée ont été, comme c'est l'habitude, séparées en groupes à leur arrivée pour la formation de base. Un groupe a reçu des instructions sur un protocole de lavage régulier des mains supervisé par leurs sergents, cinq fois par jour. L'autre groupe n'a pas reçu de consignes spécifiques autres que les instructions habituelles données lors de la formation des recrues, qui mettent l'accent sur le bon sens et la propreté du milieu environnant. Les recrues ont passé plusieurs semaines ensemble et il existait également de nombreuses données sur les taux d'infection virale (rhume et grippe) des cohortes précédentes. Les groupes qui se sont lavé les mains cinq fois par jour sous la supervision de leurs sergents ont été nettement moins atteints de maladies liées au rhume et à la grippe, mais aussi de maladies liées à des infections gastro-intestinales. De nombreuses anecdotes similaires sont maintenant disponibles sur le net, qu'elles se passent à l'école ou à l'hôpital, ce qui permet aux dirigeants de choisir plus facilement celle qui correspond le mieux à leur personnel.

La deuxième leçon est l'importance pour les leaders, à tous les niveaux, de modéliser les comportements exigés. Dans notre unité de déminage, par exemple, l'entrée avait été modifiée de telle sorte que la première chose visible par tous les opérateurs était une installation de lavage des mains bien équipée. Lorsque chaque dirigeant arrivait au travail, il se lavait les mains immédiatement, minutieusement et de manière visible, et l'habitude s'est vite répandue. Dans d'autres lieux de travail, où les dirigeants parlaient du lavage des mains sans pour autant montrer l'exemple, le succès de la lutte contre les infections s'est avéré bien plus limité.

La troisième leçon porte sur le fait que des messages clairs, transparents et pertinents sont essentiels pour réduire la peur naturelle que ressentent les gens. En cas de pandémie, les conseils donnés par les gouvernements, qui doivent constamment évoluer, doivent être diffusés rapidement. Toutefois, au lieu de se contenter de répéter les conseils, les dirigeants performants expliquent également pourquoi ces conseils sont valables et ils veillent à ce que tous les employés comprennent comment ils sont mis en œuvre dans le contexte de leur lieu de travail.

Les médias sociaux ont rendu ce problème de message encore plus critique. Les mauvais conseils, parfois malveillants, circulent maintenant avec une rapidité stupéfiante, et commencer chaque réunion par la simple question "Quelqu'un a-t-il entendu des rumeurs ou des conseils contradictoires ? " et ensuite traiter ce qui se présente, est un élément crucial du leadership en 2020 comme il l'était déjà en 2003.

Trois leçons simples en matière de leadership se dégagent de mon expérience de l'épidémie du SRAS de 2003 : rechercher une bonne anecdote pour renforcer l'importance du lavage des mains ; montrer de manière visible les comportements nécessaires en tant que leader ; et contrôler la propagation des rumeurs et des mauvaises informations par des messages clairs et pertinents.

Je travaille maintenant avec des dirigeants de haut niveau en tant que consultant et coach, et le temps où j'étais spécialiste de la guerre biologique est révolu. Cependant, je n'ai pas oublié la règle d'or pour toute crise, biologique ou autre, qui contribue largement à sauver des vies : toute personne qui commence à ressentir les symptômes associés au fait de devenir un expert confortablement assis dans son fauteuil doit immédiatement s'isoler pendant au moins 12 mois.

Dans cette crise du COVID-19, on me demande souvent mon avis sur le moment où la pandémie atteindra son point culminant, sur les taux de mortalité et sur l'efficacité potentielle des plans d'urgence des gouvernements. Je suis parfois dans un fauteuil lorsque les questions arrivent. En gardant la règle d'or à l'esprit, je réponds toujours que je ne sais tout simplement pas. Mais je sais qu'un bon lavage des mains et des messages clairs feront partie de la solution.

Dominic Brittain
Dorset, 2020