Ma carrière a débuté dans les années 1970 par un entretien de trois jours visant à évaluer si j'avais les qualités requises pour rejoindre les forces armées. Cela comprenait la série habituelle d'exercices pratiques, de travaux écrits et de discussions en l’absence de dirigeants, se terminant par un comité d'entretien présidé par un officier supérieur. Il a commencé par me demander quelle était, selon moi, la qualité la plus importante d'un leader. J'ai souri avec éclat et j'ai répondu "le sens de l'humour, Monsieur", devinant que le jury était lassé des réponses tirés des manuels scolaires incluant "intégrité" ou "esprit de décision".
Ma supposition était terriblement erronée. Après une pause inquiétante, le conseil a attaqué de toute part et j'ai passé le reste de l'entretien à défendre ma position. J'ai réussi, probablement en dépit de mes opinions plutôt que grâce à elles, mais je sais maintenant que j'avais tort. Le sens de l'humour est une qualité essentielle, mais pas la plus importante. Des années passées à diriger des hommes et des femmes dans des situations dangereuses m'ont appris que le plus important est simple. C'est de se connaître soi-même.
Cet ancien adage, s’il est bien compris, a des ramifications importantes. Si vous vous connaissez, vous connaissez vos points forts et vous pouvez les exploiter. Vous êtes également conscient de vos défauts et vous pouvez trouver des moyens de les gérer. Deuxièmement, la connaissance de soi est un antidote à l'arrogance qui semble finir par s'emparer des dirigeants de haut niveau. Ils en viennent à croire qu'ils possèdent des qualités divines : qu'ils sont immortels, tout puissants et qu'ils connaissent tout. L'orgueil précède la chute.
Troisièmement, bien que l'on soit habituellement capable de diriger les personnes occupant un poste inférieur au sien dans l'organisation, toute mon expérience me montre que l'on ne peut jamais les diriger à moins de les apprécier vraiment. Vous ne pouvez pas apprécier les autres à moins de vous apprécier vous-même, et vous ne pouvez pas vous apprécier vous-même à moins de comprendre votre personnalité.
Comment, alors, acquérir une connaissance de soi ? La première chose à faire est de rechercher et d'écouter les commentaires de votre famille et de vos amis proches. Ce sont généralement les seules personnes qui vous diront franchement qui vous êtes et comment vous êtes perçu. Ces commentaires doivent s'accompagner d'une réflexion régulière menée seul. Prenez un peu de temps chaque jour pour écouter le silence, réfléchir à vos décisions passées et rêver un peu de l'avenir. Cela vous permettra de recharger les batteries et de comprendre le fonctionnement de votre propre esprit, une étape essentielle pour la connaissance de soi.
Je recommande également une autre technique empruntée à des démineurs performants. Après chaque événement majeur, prenez le temps de réfléchir à ce qui s'est bien passé, pourquoi et comment cela est lié à votre personnalité. Profitez-en, renforcer ce que vous faites bien est vital pour votre future efficacité. Réfléchissez ensuite à ce qui ne s'est pas bien passé, à la façon dont vous pourriez le changer la prochaine fois et, à nouveau, à la façon dont cela est lié à votre personnalité.
Aujourd'hui, je me connais mieux. Je comprends que la réponse que j'ai donnée au conseil il y a 30 ans était motivée par mon amour d'être un iconoclaste, et la défense de ma position est le résultat de ma ténacité. Ces deux qualités sont de bonnes caractéristiques en matière de leadership. Je sais aussi que, à moins d'être gouvernés par la réflexion, ces mêmes traits de caractère peuvent apparaître comme un entêtement borné. Le sens de l'humour chez un dirigeant est bien plus appréciable.